Pourquoi l’IVG dans la Constitution est une victoire en demi-teinte

 La Loi constitutionnelle du 8 mars 2024 relative à la liberté de recourir à l’interruption volontaire de grossesse, comporte un article unique, qui modifie l’article 34 de la Constitution pour y inscrire que « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».

🇫🇷 C’est historique car la Constitution française n’a pas été modifiée depuis 2008. Et aussi la France devient le premier pays au monde à constitutionnaliser l’IVG !

Si on peut se réjouir de cette avancée significative, il faut tout de même en nuancer les conséquences concrètes, relatives en pratique.

D’abord, ce n’est pas le droit à l’IVG qui a été constitutionnalisé, mais la liberté des femmes à recourir à l’IVG.
Juridiquement, ce n’est pas la même chose, et la différence est de taille.

Le droit implique une créance, c’est-à-dire une relation entre un débiteur et un créancier lequel doit mettre en œuvre des actions concrètes. Ce droit lui est donc opposable. C’est ce que l’on trouve en matière de droit au logement. En conséquence, un créancier défaillant peut voir sa responsabilité engagée et ainsi être condamné.

A l’inverse, la liberté, d’essence libérale, implique l’absence d’entrave à exercer telle ou telle prérogative. Comme la liberté d’aller et venir par exemple, ou encore la liberté du commerce et de l’industrie.
La liberté implique donc une contrainte moins importante qui pèse sur l’État, celui-ci n’ayant juste pas à entraver cette prérogative, mais rien ne l’oblige juridiquement à mettre en œuvre des actions pour la rendre effective.

Ainsi dans le cas de l’IVG, la liberté ne remet pas en cause la clause de conscience des médecins, la problématique des déserts médicaux ni le problème d’accès effectif à l’IVG dont on sait qu’il n’est pas uniforme sur l’ensemble du territoire.

Ensuite, si la liberté est constitutionnalisée, ses modalités ne le sont pas. Dans ces conditions, le législateur pourrait tout à fait revenir sur certaines conditions d’accès, tels que les délais de recours à une IVG.

🌈 Enfin, s’agissant du public visé, en utilisant le terme de « femmes », les parlementaires mettent de côté plusieurs catégories de populations susceptibles de tomber enceinte tels que les hommes transgenres.


📌 En conclusion, si cette avancée est historique, éminemment symbolique, et qu’elle envoie un message très fort de par le monde, il ne faut pas oublier, et l’actualité malheureusement nous le rappelle régulièrement, qu’en matière de droit des femmes, rien n’est acquis nulle part, et que les droits des femmes et des minorités restent menacés.

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