⚖ Nous avions abordé récemment la jurisprudence rendue par la Cour de cassation le 12 juin 2024, cet arrêt indiquant en substance, qu’en matière d’agissements sexistes, le licenciement est une sanction possible.
Or, en matière d’agissements sexistes, une décision rendue par la cour d’appel de Limoges le 25 juillet dernier ne paraît pas tout à fait en phase avec cette évolution récente… Revenons sur cette affaire :
1️⃣ Les faits : un salarié d’une société de mutuelles, juriste de son état, a tenu lors d’une réunion d’équipe, les propos suivants : « La loi, c’est comme les jeunes filles, mieux on la connaît, mieux on peut la violer ».
L’employeur a immédiatement réagi, et licencié pour faute ce salarié.
2️⃣ La procédure : le salarié ayant contesté cette sanction, a été reçu dans ses prétentions, le conseil de prud’hommes de Niort ayant déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Si en appel, la Cour d’appel de Limoges a partiellement infirmé le jugement notamment sur le montant des indemnités, elle explique que :
– l’expression sexiste est caractérisée
– Mais que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Pour ce faire, elle se base sur plusieurs éléments :
– les regrets exprimés par le salarié
– sa personnalité
– sa carrière professionnelle de 12 ans au sein de l’entreprise, exempte de toute sanction…
🔴 Notre regard : la formulation de l’article L. 1142-2-1 du Code du travail n’appelle pas comme condition impérative l’intention de l’auteur.
En effet, l’agissement sexiste peut avoir pour objet de porter atteinte à la dignité de la personne, l’expression « ayant pour objet » signifiant qu’il en poursuit le but, qu’il est volontairement fait pour nuire.
Mais l’article dispose également que cet agissement peut en avoir seulement l’effet. C’est-à-dire dans cette seconde acception, qu’il est dépourvu de toute intention de nuire.
Dès lors, les justifications telles que « ce n’est pas méchant », « je ne voulais pas blesser » sont inopérantes, de même que les regrets exprimés a posteriori. Un propos graveleux même fait dans l’intention d’amuser et non de nuire, est un agissement sexiste, qu’importe les motivations de son auteur.
En outre, le texte ne fait pas état de circonstances qui viendraient atténuer la responsabilité, que ce soit au regard de la personnalité de l’auteur, ou de son parcours professionnel.
Cette décision est encore plus surprenante, au regard d’une jurisprudence récente de la Cour de cassation, rendue un mois et demi auparavant, et qui indique que l’agissement sexiste dès lors qu’il est matérialisé, est de nature à entraîner une sanction telle que le licenciement.