Harcèlement discriminatoire en droit du travail

📕 L’article L. 1152-1 du Code du travail pose un principe général d’interdiction du harcèlement moral, indiquant parmi ses éléments constitutifs la répétition d’agissements de nature à dégrader les conditions de travail du salarié.

🏛 Si la répétitivité est un élément indispensable, la jurisprudence judiciaire a pu indiquer que lorsque le harcèlement moral prend la forme d’une discrimination prohibée, il peut être constitué même en cas de fait indésirable unique.
C’est ce qu’a décidé le Défenseur des droits dans des décisions des 1er juillet 2013 et 31 juillet 2014, suivi par la Cour d’appel de Rennes dans un arrêt rendu le 10 décembre 2014.

Ceci ne s’appliquait qu’au secteur privé uniquement et ce, pendant une période de dix ans.

👩‍⚖️ Mais récemment, la jurisprudence administrative semble avoir suivi ses homologues du judiciaire.
Dans une affaire du 5 mai 2023, le Défenseur des droits a estimé que le harcèlement moral discriminatoire peut être regardé comme constitué dès lors qu’un ou plusieurs agissements portant atteinte à la dignité, telles des injures racistes, conduisent notamment à une dégradation des conditions de travail ou de l’état de santé de la victime, y compris dans la fonction publique.

Le harcèlement sexuel constitue une faute grave en droit du travail

👩‍⚖️ C’est une jurisprudence constante de la Cour de cassation, qui depuis 2002, applique une tolérance zéro en la matière : les faits de harcèlement sexuel sont qualifiés de faute grave et justifient le licenciement de l’auteur des faits. La Chambre sociale l’a encore rappelé le 27 mai 2020.

👨‍⚖️ La jurisprudence administrative est de son côté plus « frileuse », qui évoque des comportements inappropriés ou de nature à justifier une sanction disciplinaire ; c’est notamment ce qu’a dégagé la Cour Administrative D’Appel De Douai en 2012.

✅ Mais en 2013, le Conseil d’État d’État a jugé que la mise à la retraite d’office et la radiation du corps des ministres plénipotentiaires d’un ambassadeur auteur de harcèlement sexuel ne constitue pas une sanction disproportionnée.

En 2014, la juridiction suprême de l’ordre administratif a estimé que les faits de harcèlement justifient l’exclusion temporaire de fonctions de 2 ans décidée par l’employeur.

Plus récemment en 2019, le Conseil d’État a validé la sanction disciplinaire d’interdiction d’exercer toutes fonctions d’enseignement ou de recherche dans l’établissement universitaire concerné pendant un an, avec privation de la totalité du traitement.

 Les conséquences du harcèlement moral ne sont pas cumulatives

📕 En droit du travail, les agissements répétés de harcèlement moral doivent avoir pour conséquence la dégradation des conditions de travail, qui sont de 3 ordres :

– en premier lieu, ces agissements peuvent porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié
– en second lieu, ils peuvent altérer sa santé physique
– enfin, ils peuvent compromettre son avenir professionnel.

👨‍⚖️ En 2010, la Chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que ces conditions ne sont pas cumulatives.

❌ Ainsi, le juge ayant constaté que les agissements de l’employeur avaient altéré la santé de la salariée, il n’avait pas à rechercher si la dégradation des conditions de travail portait cumulativement atteinte à ses droits et à sa dignité.
✅ Le harcèlement moral est qualifié lorsque la situation de travail d’un salarié se dégrade progressivement, sans aucune raison valable.

Réf. : Cass. Soc., 10 mars 2010, n° 08-44.393, F-D N° Lexbase : A1734ETE