🚨 Affaire Julie et condamnation de la France par la CEDH

Le 24 avril 2025, la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France dans l’affaire qui bouleverse depuis des années : celle de « Julie », violée par des pompiers entre ses 13 et 15 ans.

🟢 Les faits : une adolescente de 13-14 ans, souffrant de crises de tétanie nécessitant plus de 130 interventions de pompiers à son domicile sur plusieurs années, violée par plusieurs d’entre eux alors qu’ils connaissaient son âge.

🔴 La procédure :
Elle s’étale sur plus de 10 ans.
En novembre 2024, deux pompiers ont été condamnés à des peines avec sursis pour « atteintes sexuelles sur mineure ». Cette qualification a été retenue après une requalification des faits, puisqu’ils étaient initialement poursuivis pour viols.

Les juges français ont estimé que Julie « disposait du discernement nécessaire pour consentir ». Ils ont évoqué son « comportement parfois débridé » qui n’aurait pas « incité les sapeurs-pompiers à la réflexion ».

Ce que dénonce la CEDH dans le raisonnement des juridictions françaises :
🔸 L’usage de stéréotypes discriminatoires dans l’appréciation du consentement
🔸 La méconnaissance de la vulnérabilité lié à l’âge, la maladie, la dépendance
🔸 La victimisation secondaire directement issue de la procédure et de ses impacts sur la victime
🔸 La longueur de ladite procédure, avec une enquête tardive et 11 ans de procédure au total.

➡️ L’apport jurisprudentiel : cet arrêt s’inscrit dans une série de condamnations européennes questionnant l’approche française du consentement des mineures, la prise en compte de leur vulnérabilité particulière et plus largement la question du traitement des violences sexuelles en France.

Source : https://www.echr.coe.int/fr/w/judgment-concerning-france-19

🚨 Evolution de la définition du viol dans la loi

Le 18 juin dernier, les membres du Sénat ont voté en faveur de l’introduction de la notion de consentement dans la loi pénale régissant le viol et les agressions sexuelles.

Ceci est une avancée majeure en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, surtout s’agissant d’une chambre essentiellement conservatrice.

Le 1er avril dernier, c’est l’Assemblée nationale qui avait adopté ce texte, dont la portée est fondamentale s’il venait à être adopté dans les termes déclinés au sein de la proposition de loi déposée par Marie-Charlotte Garin, Véronique Riotton, Cyrielle Chatelain et Gabriel Attal.

Dans la loi actuelle, afin de démontrer que la victime n’est pas consentante, preuve doit être faite de ce que son consentement a été violenté, contraint, menacé ou surpris. A défaut, la victime est réputée être consentante…

Or ces quatre modalités ne sont pas représentatives de toutes les situations où un consentement peut être forcé. En ce sens, la Cour de cassation a pu juger que l’état de sidération d’une victime, figée dans l’incapacité de s’opposer à tout le moins verbalement, est une circonstance dans laquelle le consentement ne peut être déduit (Cass., crim., 11 sept. 2024, n°23-86.657). Cette décision n’est cependant pas un arrêt de principe, c’est-à-dire une décision qui a vocation à donner une tendance que les autres juridictions d’appel et de première instance doivent suivre. Elle s’analyse plutôt comme une jurisprudence spécifique au cas de l’espèce. C’est d’ailleurs ce que le Conseil d’État a souligné dans son avis consultatif du 11 mars 2025. Dans cet avis, la plus haute juridiction administrative valide l’intégration de la notion de consentement dans la loi pénale sur le viol et les agressions sexuelles, notamment pour se conformer aux exigences européennes. La France ayant été condamnée à plusieurs reprises sur ce sujet par la Cour Européenne des Droits de L’Homme.

D’où la nécessité de changer de paradigme, pour tendre vers une culture du consentement.
L’adoption finale du texte nécessite son passage devant une Commission Mixte Paritaire afin notamment de finaliser sa rédaction.

Pour retrouver une analyse juridique complète et détaillée de cette proposition : voir l’analyse dans AJPénal de juin 2025 faite par François Lavallière et Audrey Darsonville.