❌ Le refus de prendre une plainte

Suite à notre article visible ici 👉 https://shorturl.at/AOAXW concernant la validation de la sanction d’un gendarme relative à l’accueil réservé à une usagère, un petit point législatif et jurisprudentiel :

📕 Pour rappel, l’article 15-3 du Code de procédure pénale prescrit aux OPJ de prendre toute plainte qui leur est soumise. L’appréciation relative à la qualification juridique des faits appartient au Ministère public, disposant seul de l’opportunité des poursuites.

📜 Ce qui est rappelé par la charte relative à l’accueil du public et des victimes, affichée dans les commissariats et gendarmeries.

🔎 Une enquête conduite par le Défenseur des droits en 2024 a notamment mis en évidence que 1 personne sur 5 souhaitant déposer une plainte ou une main courante a essuyé un refus.

⚖️ Plusieurs juridictions se sont prononcées de manière unanime sur le sujet, qu’elles soient judiciaires ou administratives :

🔺 La Cour de cassation estime que le refus de prendre une plainte est susceptible de constituer une atteinte au droit fondamental d’accès à la justice, notamment lorsqu’il empêche une victime de faire valoir ses droits dans un délai raisonnable (Cass., civ. 1°, 15 juin 2017, n°16-17.943).

🔺 La Cour administrative d’appel de Lyon reconnaît comme étant une carence fautive de l’administration le fait, pour un gendarme, de refuser d’enregistrer une plainte, sans justification légale (CAA Lyon, 9 juillet 2019, n°17LY04378). Cette circonstance est de nature à constituer un dysfonctionnement du service public, engageant par la même la responsabilité de l’Etat (Tribunal administratif de Paris, 12 octobre 2021, n°2002345).

🔺 Le Défenseur des droits quant à lui, rappelle régulièrement que les OPJ ne peuvent refuser l’enregistrement d’une plainte (Décision MDS-2013-41 du 26 mars 2013, Décision n°2024-150 du 22 octobre 2024).


Pour connaître vos droits et consulter l’enquête 👉 https://shorturl.at/Q9EME

Tout savoir sur le lanceur d’alerte

Terme à la mode depuis plusieurs années, le lanceur d’alerte est passé d’une notion floue et inconnue à un cadre juridique réglementé.

➡️ Qu’est-ce qu’un lanceur d’alerte ?
C’est une personne physique qui signale des faits, en général fautifs ou répréhensibles, dont elle n’est pas nécessairement la victime directe.

Par exemple, elle peut être témoin de faits de harcèlement par un supérieur sur un subordonné sans être directement visée. Elle peut encore s’apercevoir d’irrégularités dans des procédures comptables, susceptibles de constituer des abus de biens sociaux.

➡️ Un lanceur d’alerte est-il protégé ?
Oui, depuis la loi Sapin II du 9 décembre 2016 et une loi du 21 mars 2022.
A condition de correspondre à la définition du lanceur d’alerte prévue par la loi et de respecter la procédure spécifique mise en oeuvre en vue de signaler les faits sur lesquels porte l’alerte.

➡️ En quoi consiste cette protection ?
Le lanceur d’alerte ne peut faire l’objet de mesures de rétorsion pour avoir effectué son alerte. Dans la sphère professionnelle, toutes les décisions prises par la hiérarchie qui viseraient à sanctionner, menacer de sanctionner, harceler, intimider, discriminer un lanceur d’alerte sont illicites. Elles peuvent être remises en cause en justice, par le lanceur d’alerte lui-même, qui peut solliciter une indemnisation en réparation du préjudice subi.
Etant précisé que ces représailles peuvent également émaner de collègues ou du collectif de travail, et seraient toutes aussi illicites.

⚠️ A noter que le lanceur d’alerte dispose d’un régime probatoire aménagé facilitant la démonstration de l’existence de représailles à son encontre. Ainsi, il suffit de présenter des éléments permettant de supposer que l’alerte a été effectuée suivant la procédure prescrite par la loi. A charge pour la partie adverse de démontrer que les décisions prises à l’encontre du lanceur d’alerte sont objectivement fondées, exemptes de toute mesure de rétorsion.

Pour aller plus loin : voir le guide élaboré par le Défenseur des droits 👉 https://shorturl.at/JzbHA

Protection contre les mesures de rétorsion

Les représailles, encore appelées mesures de rétorsion, sont des agissements illicites susceptibles de survenir en milieu professionnel dans des situations et contextes variés.

Elles peuvent émaner d’un ou plusieurs collègues, comme de supérieur(s) hiérarchique(s) voire de l’organisation dans son ensemble.

Tant le Code du travail que le Code général de la fonction publique prohibent ce type de mesures.
Par exemple, un salarié ayant subi, refusé de subir ou dénoncé un harcèlement (qu’il en soit victime ou témoin), ne saurait faire l’objet de mesures, telles des sanctions déguisées ou des décisions impactant négativement son évolution professionnelle…

Le Conseil d’État d’État a rappelé que la victime de discrimination, de harcèlement sexuel ou discriminatoire ne peut se voir imposer un changement d’affectation, une mutation ou un détachement, que si aucune autre mesure, prise notamment à l’égard des auteurs des agissements, n’est de nature à préserver la santé de l’agent ou satisfaire l’intérêt du service (CE, 19 décembre 2019, n° 419062).

D’autres mesures ont pu être qualifiées de rétorsion, et ainsi déclarées illicites :
– l’envoi d’un courrier particulièrement offensif remettant en cause de façon injustifiée le comportement de la signalante (Défenseur des droits, déc. n° 2020-223 du 19 novembre 2020)

– la mutation d’une salariée suite à son signalement et le fait de la contraindre à des contre-visites médicales abusives (Défenseur des droits, déc. n° 2021-239 du 31 août 2021)

– le fait pour l’employeur qui a certes sanctionné l’auteur du harcèlement, mais également contraint la victime présumée à télétravailler, à une dispense d’activité rémunérée ou à l’inciter fortement à changer ses conditions de travail pendant ou après l’enquête interne (Cour de cassation, chambre sociale, 17 février 2021, n° 19-18.149)

– le licenciement, après enquête, d’une victime présumée pour faute grave en raison de certains termes employés dans son courrier de signalement (Défenseur des droits, déc. n° 2022-083 du 31 août 2022)

– le licenciement d’une salariée pour avoir évoqué son signalement auprès de la caisse d’assurance maladie (Défenseur des droits, déc. n° 2022-234, 3 janvier 2023)

– la menace par l’employeur de poursuites judiciaires de façon injustifiée (Défenseur des droits, déc. n° 2024-105 du 11 juillet 2024).