En droit du travail, comme en droit de la fonction publique, le principe général de non discrimination implique qu’aucune décision ne peut être prise relativement au recrutement, à l’évolution de carrière, la formation, l’octroi de congés, la rémunération etc., sur la base d’un critère discriminatoire, par exemple l’activité syndicale d’un salarié ou d’un agent.
💥 Une jurisprudence récente en matière judiciaire permet d’alléger la démonstration de la discrimination. Afin d’en étudier sa portée, revenons sur les caractères de la discrimination :
📕 Afin d’être caractérisée, la discrimination suppose la réunion de plusieurs conditions :
1️⃣ un traitement défavorable
2️⃣ relevant d’un périmètre visé par la loi, par exemple l’emploi
3️⃣ et fondé sur un critère arbitraire, en l’occurrence les activités syndicales.
S’agissant de la charge de la preuve, un régime probatoire aménagé permet au plaignant d’apporter des éléments laissant supposer qu’il est victime d’un traitement discriminatoire. Nous vous en parlions ici 👉 https://rb.gy/psk25j
Concernant la démonstration du traitement défavorable, elle s’appuie traditionnellement sur la comparaison opérée avec d’autres agents, placés dans la même situation ou dans une situation similaire.
C’est ce que la Cour d’appel de Paris avait retenu dans cette espèce, indiquant que le plaignant ne produisait pas d’éléments permettant d’établir une comparaison avec d’autres salariés.
🤔 Or il peut être très difficile d’apporter des éléments relatifs à d’autres salariés, permettant d’établir une comparaison et matérialisant une différence au détriment du plaignant.
📌 Novatrice, la Cour de cassation indique que « l’existence d’une discrimination n’implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d’autres salariés ».
La Haute Juridiction estime ainsi que les éléments produits par le salarié étaient suffisants à laisser présumer l’existence d’une discrimination à son encontre, et qu’il appartenait à l’employeur de démontrer que les différentes décisions prises à son encontre, étaient objectivement fondées.
👉 Cet arrêt revêt une portée significative, ouvrant la voie à une démonstration facilitée de la possible existence d’une discrimination, tous critères confondus, la formulation n’incluant pas spécifiquement la discrimination syndicale, s’appliquant potentiellement à tout critère de discrimination.
Réf. : Cour de cassation, Chambre sociale, 2 octobre 2024, n°23-15.636
Étiquette : employeur
📊 Égalité professionnelle dans la fonction publique : le Rapport de Situation Comparée, un outil clé pour les employeurs
L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes n’est pas qu’un objectif, c’est une obligation légale. Pourtant, dans la fonction publique comme dans le secteur privé, les écarts persistent : salaires, évolutions de carrière, accès aux postes à responsabilité…
Le Rapport de Situation Comparée (RSC) est un outil essentiel pour mesurer ces inégalités et mettre en place des actions correctrices. A ce jour, il reste méconnu et sous-exploité. Faisons le point ! 👇
📌 Le Rapport de Situation Comparée, c’est quoi ?
Le RSC est un document obligatoire pour les employeurs publics. Il vise à analyser les écarts entre les femmes et les hommes dans différents domaines : rémunération, formation, conditions de travail, accès aux promotions…
Son objectif ? Objectiver les inégalités et proposer des mesures correctives pour garantir une égalité réelle entre les agents.
📌 Qui est concerné ?
🔹 Les collectivités territoriales
🔹Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de plus de 20 000 habitants
🔹 Les administrations d’État
🔹 Les hôpitaux publics
📌 Que doit contenir un RSC ?
✅ Un état des lieux statistique des effectifs
✅ Les écarts de rémunération
✅ Les évolutions de carrière et promotions
✅ L’accès à la formation
✅ Les conditions de travail
✅ Les mesures mises en place pour réduire ces écarts
Au-delà d’une obligation, le RSC est un levier stratégique pour bâtir des politiques RH plus inclusives et adaptées aux enjeux actuels.
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Condamnation de l’employeur pour défaut de conduite d’enquête suite à une dénonciation de harcèlement moral
Conformément à son obligation de sécurité, lorsqu’il est informé de faits pouvant relever d’une situation de harcèlement moral, l’employeur doit diligenter une enquête au sein de son entreprise.
Une salariée ayant informé son employeur de faits susceptibles de caractériser un harcèlement moral, a par la suite, été licenciée pour insuffisance professionnelle.
Si la cour d’appel a estimé que le harcèlement moral n’était pas établi, et que dans ces conditions l’employeur n’avait pas d’enquête à effectuer, la Haute juridiction rappelle à l’inverse que, l’employeur avisé de tels faits, doit obligatoirement diligenter une enquête, que les faits soient finalement avérés ou non.
Réf. : Cour de cassation, Chambre sociale, 27 novembre 2019, 18-10.551
Le harcèlement discriminatoire est caractérisé même sans intention de nuire
🏦 C’est ce qu’il ressort d’une jurisprudence de la Chambre criminelle de 2006, ou encore d’une décision du Défenseur des droits de 2014 : le harcèlement discriminatoire peut être reconnu même si l’auteur des faits n’a pas agi avec l’intention de nuire.
Ainsi, des agissements définis par l’auteur lui-même comme portant peu à conséquence et insusceptibles d’offenser autrui, doivent toujours s’analyser au regard de la perception et du ressenti provoqués chez la personne qui les reçoit.
D’où l’appréciation éminemment subjective en matière de harcèlement discriminatoire, la blague ou l’humour dit « potache » étant susceptibles d’offenser son destinataire et d’engager la responsabilité de l’employeur qui faillirait à son obligation d’assurer la santé et la sécurité de ses salariés, laquelle est, rappelons-le, une obligation de résultat.
Outrage sexiste, agissement sexiste… quelles différences ?
Outrage sexiste, agissement sexiste… des qualifications similaires, récentes, dont on entend de plus en plus parler, sans vraiment savoir ce qu’elles recoupent. Les deux sont prévues par la loi et sanctionnées, certes. Mais quelles différences concrètes entre les deux ?
Ces textes ont en commun de réprimer le sexisme, qu’il soit bienveillant, hostile ou ambivalent. Si l’un a une portée générale, l’autre vise spécifiquement la sphère du travail.
✦ L’outrage sexiste est prévu par le Code pénal à l’article 621-1. Cette infraction est récente, puisqu’elle fait son entrée dans l’arsenal juridique en 2018.
L’outrage sexiste consiste à imposer à une personne, tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
L’outrage sexiste est une infraction de type contraventionnel, qui fait encourir une amende pouvant aller jusqu’à 750 € dans ses formes simples, une aggravation pouvant porter cette somme jusqu’à 1500 €. Ces circonstances aggravantes sont notamment la commission des faits par un supérieur hiérarchique qui abuserait de ses fonctions, ou encore une victime mineure…
✦ L’agissement sexiste est prévu par le Code du travail depuis la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, qui crée un article L. 1142-2-1 lequel énonce que « nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».
La définition est fort ressemblante avec la définition du Code pénal, avec des conditions cumulatives :
- le caractère subi de l’acte, marqué par une absence de consentement
- le caractère stéréotypé en raison du sexe, étant précisé qu’il est susceptible de concerner tant les stéréotypes masculins que féminins,
- l’atteinte à la dignité de la personne ou la conséquence de créer un environnement délétère, ces conditions impliquant que l’agissement puisse être non intentionnel.
En termes de sanctions, le Code du travail prévoit des sanctions disciplinaires, c’est-à-dire que l’employeur peut sanctionner l’auteur d’un agissement sexiste sur le fondement de son pouvoir de direction : avertissement, blâme…
Les différences tiennent donc à la source et à ses conséquences : Code pénal pour l’un avec des sanctions pénales, Code du travail pour l’autre avec des sanctions disciplinaires. A noter que l’une n’est pas exclusive de l’autre ; un salarié qui dénonce un agissement sexiste en entreprise, peut tout à faire déposer une plainte pour outrage sexiste.
L’enquête interne, en quelques mots…
C’est quoi ?
Il s’agit une procédure d’examen déclenchée au sein d’une structure, visant à établir la matérialité de faits rapportés à la direction et qui peuvent s’apparenter à des faits délictueux de type violences sexistes et sexuelles, harcèlement…
Ce n’est pas une procédure disciplinaire. Si les faits sont avérés par le rapport final de l’enquête interne, une procédure disciplinaire peut effectivement avoir lieu ensuite et conduire à des sanctions, mais ce n’est pas la finalité de l’enquête interne.
Que dit la loi ?
Dans le secteur privé : obligation est faite à l’employeur de mener une enquête interne dès lors qu’il a connaissance de faits a minima constitutifs de harcèlement. La loi et la jurisprudence sont très claires à ce sujet.
Dans le secteur public : d’abord érigée en recommandation, il s’agit désormais d’une obligation, depuis une circulaire du 9 mars 2018 pour la fonction publique qui prévoit qu’une administration saisie de faits de harcèlement, doit diligenter une enquête interne.
Et en pratique ?
C’est la direction qui déclenche l’enquête interne. En sachant que si les faits proviennent de la direction elle-même et/ou qu’elle n’agit pas, des acteurs externes (rectorat pour la fonction publique, inspection du travail) peuvent être saisis.
L’enquête, tous secteurs confondus, doit démarrer dans les plus brefs délais, en réalité immédiatement dès la connaissance des faits.
Quelles sanctions ?
Une enquête mal faite, réalisée partiellement, ou encore non conduite, engage la responsabilité de l’employeur, tant dans le privé que dans le public.
L’enquête doit respecter un certain nombre de principes : contradictoire, impartialité, qu’il peut être difficile à mettre en œuvre en étant à la fois juge et partie. Dans cette optique, outre une formation à la conduite d’enquête, il est possible d’externaliser l’enquête => Callisto peut vous aider ! Contactez-nous !
Zoom sur les violences sexistes et sexuelles
Depuis quelques années, l’expression « violences sexistes et sexuelles » est entrée dans le langage courant, sans qu’on sache réellement de quoi il s’agit. Le point rapidement.
Définition
Les violences sexistes et sexuelles sont, comme leur nom l’indique, des violences, répréhensibles et incriminées par le Code pénal. Ce sont des infractions.
De gravité différente, elles sont classées en trois catégories avec des implications, enjeux et conséquences différents :
- il peut s’agir de contraventions, tel est le cas de l’outrage sexiste. Jugées par le tribunal de police, les contraventions font encourir principalement des peines d’amende.
- il peut s’agir encore de délits, comme par exemple le harcèlement sexuel, et le tribunal correctionnel sera compétent pour en juger. La peine encourue peut être une peine d’emprisonnement et/ou d’amende.
- enfin, il peut s’agir d’un crime, comme c’est le cas pour le viol. Les crimes sont jugés par une juridiction spécialisée, la Cour d’assises, qui fait encourir au minimum une peine de réclusion criminelle de 10 ans. Le viol dit simple c’est-à-dire sans circonstance aggravante, fait encourir une peine de15 ans d’emprisonnement.
Bien noter que les peines peuvent être aggravées, lorsque des circonstances dites aggravantes viennent s’ajouter aux chefs d’accusation. Il en va ainsi d’un viol commis par une personne ayant autorité sur la victime, que cette autorité soit naturelle (ascendants) ou bien qu’elle soit le fait d’un rapport hiérarchique, typiquement liée à une relation de subordination entre un responsable hiérarchique et son employé direct.
Les conséquences des violences sexistes et sexuelle
Les violences sexistes et sexuelles ont des répercussions directes sur les personnes victimes, sur leur intégrité physique, psychique ou encore morale. Certaines peuvent développer des états de stress post-traumatique.
Le panel des conséquences est très large, souvent méconnu et mal compris des proches de victimes.
Parmi elles, se retrouvent notamment : les troubles de l’humeur (irritabilité), troubles du sommeil (difficultés d’endormissement, sommeil agité, réveils nocturnes…), trouble de la concentration, de la mémoire, troubles alimentaires, anxiété – ponctuelle à chronique, hypervigilance, dépression, consommation d’alcool, de drogues ou de médicaments psychotropes… La liste est loin d’être exhaustive.
Elle diffère en fonction des gens, de leur vécu, leur histoire, leurs traumatismes antérieurs éventuels.
IMPORTANT : l’impact des répercussions psychiques et morales n’a aucune corrélation avec la gravité légale des infractions (contravention, délit, crime). Dit autrement, une victime de harcèlement sexuel peut être tout autant voire davantage choquée, perturbée, traumatisée qu’une victime de viol. Il n’y a aucun rapport entre les deux, le ressenti étant propre à chaque personne, à son vécu, son histoire etc.
Des incriminations partielles
Il n’existe pas de législation globale sur les violences sexistes et sexuelles, uniquement des textes épars, qui sanctionnent chacun des comportements particuliers.
L’expression « violences sexistes et sexuelles » n’est pas juridique en soi, néanmoins elle désigne cet ensemble de comportements, tous à connotation sexuelle, qui ont pour point commun d’être illégaux.
Néanmoins, la multitudes de textes, dont certains sont applicables au droit du travail exclusivement, rend l’identification des différentes incriminations délicate et peu lisible.
A noter aussi que la loi est évolutive. Par exemple s’agissant du viol, une précision a été apportée par le législateur le 23 avril 2021, qui inclut désormais dans la définition le rapport bucco-génital forcé commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur.
Il en va de même du harcèlement, dont la définition a fait l’objet de vives critiques puis d’une refonte en 2012.
Des sanctions peu effectives
Des études, notamment celle du Haut Commissaire à l’Égalité Femmes-Hommes révèlent que plus de 100.000 viols sont perpétrés chaque année en France.
Moins de 10 % des victimes portent plainte. Et entre 1 et 2 % font l’objet d’une condamnation1.
C’est dire que les textes existent mais qu’ils ne sont pas appliqués, donc pas effectifs.
D’où l’importance de communiquer sur les violences sexistes et sexuelles, d’en parler autour de soi, entre amis, proches, à la machine à café, au travail, lors d’activités de loisir.
D’où l’importance de la sensibilisation, car elle est l’affaire de chacun.
Vous souhaitez mettre en place une action de sensibilisation au sein de votre entreprise, structure, collectivité territoriale ? Contactez-nous : contact@projet-callisto.fr
1https://www.haut-conseil-egalite.gouv.fr/violences-de-genre/travaux-du-hce/article/avis-pour-une-juste-condamnation
Harcèlement : les acteurs à solliciter
Il est parfois difficile de savoir comment réagir face à un situation de harcèlement, qu’elle soit vécue, vue, entendue ou simplement rapportée.
Dans tous les cas, il peut être judicieux d’être aidé, accompagné, dans un premier temps pour savoir s’il s’agit bien de fait de harcèlement, et ensuite le cas échéant, pour savoir comment agir et réagir.
D’une manière générale, quelque soit leur situation, les personnes – victime ou identifier des interlocuteurs potentiels pour trouver des informations, de l’aide, ou solliciter un accompagnement.
Pourtant, plusieurs acteurs se trouvent être des relais pour une information, primaire ou plus approfondie en matière de harcèlement et de sexisme.
Ces acteurs peuvent être internes à l’entreprise, ou bien externes à celle-ci.
Les acteurs internes à l’entreprise
♞ Le Comité social et économique (CSE) est l’instance de représentation du personnel dans l’entreprise. Il doit être mis en place dans les entreprises de plus de 11 salariés. Ses membres sont élus par les salariés de l’entreprise pour une durée maximale de 4 ans.
Depuis le 1er janvier 2019, dans toutes les entreprises quelque soit leur effectif, le CSE doit désigner parmi ses membres, un référent harcèlement pour la lutte contre le harcèlement sexuel et les agissement sexistes.
♞ Dans les entreprises de plus de 250 salariés, un référent harcèlement doit être spécialement désigné par l’employeur.
Il est ainsi différent du référent désigné par le CSE. Néanmoins, leurs missions tendant à être similaires, elles ont besoin d’être articulées.
♞ Au-delà de ces personnes désignées, tout acteur de l’entreprise peut être sollicité dès lors qu’il constitue une personne ressource ou de confiance : qu’il s’agisse du service des ressources humaines, d’un membre de ce service, du directeur des ressources humaines, d’un responsable, d’un membre des organes de direction, d’un salarié du même service, d’un manager d’un autre service…
Il est bien évident que tous ne sont pas nécessairement formés en matière de harcèlement et de prévention du sexisme, néanmoins ils peuvent être un premier contact, éventuellement un soutien. A charge pour eux d’accompagner, d’orienter la personne vers un relai spécialement dédié.
♞ S’agissant de la direction, il convient de rappeler quelques chiffres : malgré le mouvement de libération de la parole, 1 individu sur 10 ne parle à personne des agissements subis.
Pire encore, dans 70% des cas, ni l’employeur, ni la direction, n’ont été informés de la situation.
IMPORTANT : Il est impératif de comprendre que seul l’employeur, à partir du moment où il est informé de faits de harcèlement, a le pouvoir et le devoir d’engager une procédure particulière d’enquête, laquelle est seule à même de faire lumière sur les faits allégués.
Cette démarche a pour objectif de révéler les faits subis, et permet une fois celle-ci menée à son terme, de prendre des mesures disciplinaires contre l’auteur des faits.
Il convient néanmoins de se garder de tout angélisme : selon une enquête de 2014 menée pour le Défenseur des Droits, 1 femme sur 5 sera victime de harcèlement sexuel au cours de sa vie professionnelle. Déjà en 1991, une étude rapportait sensiblement les mêmes chiffres et ce, malgré un accroissement des droits des victimes et des dispositifs existants. La difficulté tient notamment aux problème relatifs à la preuve, que la loi semble avoir pour partie résolus, et également à la difficulté de révéler ce type de faits.
En effet, lorsqu’il y a dénonciation, elle apparaît souvent comme faite au détriment de la victime ; 40% des personnes harcelé.e.s estiment que l’affaire s’est achevée à leur détriment.
On retrouve souvent les mêmes mécanismes de banalisation (tout le monde fait ça, c’est partout pareil), de minimisation (c’est pas si grave, y a pas mort d’homme, il ne t’a pas violé), ou encore de culpabilisation de la victime (tu t’attendais à quoi en rentrant dans son bureau ? Oui mais tu y es allé quand même…).
Ce faisant, on cautionne, valide, autorise des comportements qui sont a minima irrespectueux, blessants, humiliants, et dans les pires scénarios, illégaux.
Dans les faits, on a tous été un jour témoin ou la cible d’une remarque, un peu déplacée, pas forcément lancée dans le but de nuire, mais maladroite ou vexante. On a été nombreux à ne pas forcément répliquer, et à ne pas forcément en parler.
Historiquement, un certain nombre d’affaires et de scandales (DSK, Weinstein, octobre 2017) suivis de mouvements de libération de la parole, ont permis une hausse massive dans signalements.
En conséquence, face à l’ampleur du phénomène qui a touché toutes les sphères de la société, en particulier la sphère professionnelle, le législateur français a procédé au renforcement des obligations des employeurs en matière de prévention et de sanction du harcèlement sexuel.
D’où l’importance de ne pas garder des faits, quand bien même il y a un doute. D’où l’importance d’en parler, de libérer la parole, de demander de l’aide.
Les acteurs externe à l’entreprise
Hors les murs de l’entreprise, les conseillers du salarié dont la liste est établie par la Direction Départementale chargée de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DDETS, ancienne DIRECCTE), peuvent relayer des informations, écouter et orienter une demande.
Ce sont les membres de l’inspection du travail qui peuvent avoir ce rôle, accueillir, écouter, recueillir des signalements, oralement ou par le biais de courriers, qu’ils soient postaux ou électroniques.
En outre, la médecine du travail à l’occasion des visites médicales périodiques peuvent être un premier relai d’information en la matière.
Enfin, des associations d’aide aux victimes, le délégué du Défenseur des Droits, qui tient des permanences en général au sein des Préfectures de chaque département, ou encore des avocats peuvent informer, renseigner, orienter des personnes qui s’interrogent sur ces problématiques.
Pour toute question complémentaire et pour aller plus loin, n’hésitez pas à nous solliciter : contact@projet-callisto.fr
L’agissement sexiste, une incrimination récente
Le texte :
La loi du 17 août 2015 a crée dans le Code du travail, un article L. 1142-2-1 relatif à l’interdiction de tout agissement sexiste en milieu professionnel.
Le texte explique que « nul ne doit subir d’agissement sexiste défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».
Des exemples :
Dans son kit pour agir contre le sexisme, le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes cite un certain nombre d’exemples significatifs pour illustrer les multiples formes que peut prendre un agissement sexiste. C’est par exemple :
– critiquer une femme parce qu’elle n’est pas assez féminine selon l’auteur
– critiquer un homme parce qu’il n’est supposément pas assez viril
– avoir une conduite verbale ou une posture corporelle qui montre de l’hostilité envers une personne en raison de son sexe : misogynie avérée, dédain, mépris pour une personne en raison de son sexe, ou pour une catégorie de personnes en raison de leur sexe
– ne pas prendre les compétences des salariés au sérieux, et les humilier parce que ce sont des femmes par exemple : « bonnes à faire la popote », « t’aurais du rester dans ta cuisine »…
– commentaires humiliants ou désobligeants en raison du sexe
– proférer des menaces ou tout autre comportement verbal ou physique fondé sur le sexe de la personne
– faire des blagues sexistes, obscènes, graveleuses, de manière répétée
– fragiliser le sentiment de compétence par des remarques ou des pratiques offensantes…
La sanction :
À l’inverse d’autres incriminations (cf infra), le sexisme ordinaire est dépourvu d’équivalent dans le Code pénal. En effet, l’auteur d’un agissement sexiste est seulement susceptible d’être sanctionné de manière disciplinaire par son employeur.
Concrètement, il encourt un avertissement, un blâme, ou toute autre mesure disciplinaire telle une rétrogradation, une mutation et éventuellement, si les conditions le permettent, un licenciement.
Cette sanction touche tout type de collaborateur de l’entreprise, aussi bien les cadres que les employés, puisque l’auteur d’un agissement sexiste peut se trouver être un supérieur hiérarchique direct, un responsable ou encore un collègue de la victime.
Pour attraire devant les juridictions répressives (tribunal correctionnel), il convient de se référer à des infractions pénales approximatives du sexisme, comme les injures à caractère sexiste, le harcèlement, moral ou sexuel, ou la discrimination en raison du sexe.
Distinction avec des notions voisines :
❦ Le harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel, suppose des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits, à la dignité, à la santé ou à l’avenir professionnel de la personne.
Le harcèlement est réprimé à la fois par le Code du travail et par le Code pénal. C’est-à-dire qu’il fait encourir à la fois une sanction disciplinaire et une sanction pénale.
L’agissement sexiste quant à lui, est un comportement unique, ponctuel, réprimé de manière disciplinaire uniquement.
A noter : à partir du moment où l’agissement sexiste vient à se répéter, il peut être constitutif de harcèlement sexuel.
❦ La discrimination s’entend d’une différence de traitement reposant sur un motif lié à la santé, à l’âge, au sexe, à la religion, aux opinions d’une personne (liste non exhaustive). Elle est un délit pénal, et fait encourir 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
L’agissement sexiste peut constituer une mesure de discrimination, mais ce n’est pas systématique.
⇒ D’une manière générale, la notion de sexisme, a fortiori celle de sexisme ordinaire, est codifiée dans la notion d’agissement sexiste alors que dans le harcèlement et la discrimination, elle ne se retrouve pas à proprement parler ; elle peut s’y retrouver, mais ce n’est pas leur essence.
La responsabilité de l’employeur :
L’employeur est susceptible de voir sa responsabilité civile engagée, et être ainsi condamné à réparer le préjudice subi.
En effet, la victime a la possibilité de saisir le conseil des prud’hommes en vue d’obtenir réparation. Cela peut se faire de deux façons :
– au titre de la violation de l’interdiction de tout agissement sexiste sur le lieu de travail, s’il est commis par un salarié de l’entreprise,
– au titre du non-respect, par l’employeur, de son obligation de santé et de sécurité, et ce, quelle que soit la personne ayant commis ces agissements (client, collègue, supérieur).