L’enquête interne, en quelques mots…

C’est quoi ?

Il s’agit une procédure d’examen déclenchée au sein d’une structure, visant à établir la matérialité de faits rapportés à la direction et qui peuvent s’apparenter à des faits délictueux de type violences sexistes et sexuelles, harcèlement…

Ce n’est pas une procédure disciplinaire. Si les faits sont avérés par le rapport final de l’enquête interne, une procédure disciplinaire peut effectivement avoir lieu ensuite et conduire à des sanctions, mais ce n’est pas la finalité de l’enquête interne.

Que dit la loi ?

Dans le secteur privé : obligation est faite à l’employeur de mener une enquête interne dès lors qu’il a connaissance de faits a minima constitutifs de harcèlement. La loi et la jurisprudence sont très claires à ce sujet.
Dans le secteur public : d’abord érigée en recommandation, il s’agit désormais d’une obligation, depuis une circulaire du 9 mars 2018 pour la fonction publique qui prévoit qu’une administration saisie de faits de harcèlement, doit diligenter une enquête interne.

Et en pratique ?

C’est la direction qui déclenche l’enquête interne. En sachant que si les faits proviennent de la direction elle-même et/ou qu’elle n’agit pas, des acteurs externes (rectorat pour la fonction publique, inspection du travail) peuvent être saisis.
L’enquête, tous secteurs confondus, doit démarrer dans les plus brefs délais, en réalité immédiatement dès la connaissance des faits.

Quelles sanctions ?

Une enquête mal faite, réalisée partiellement, ou encore non conduite, engage la responsabilité de l’employeur, tant dans le privé que dans le public.

L’enquête doit respecter un certain nombre de principes : contradictoire, impartialité, qu’il peut être difficile à mettre en œuvre en étant à la fois juge et partie. Dans cette optique, outre une formation à la conduite d’enquête, il est possible d’externaliser l’enquête => Callisto peut vous aider ! Contactez-nous !

Harcèlement : les acteurs à solliciter 

Il est parfois difficile de savoir comment réagir face à un situation de harcèlement, qu’elle soit vécue, vue, entendue ou simplement rapportée.
Dans tous les cas, il peut être judicieux d’être aidé, accompagné, dans un premier temps pour savoir s’il s’agit bien de fait de harcèlement, et ensuite le cas échéant, pour savoir comment agir et réagir.

D’une manière générale, quelque soit leur situation, les personnes – victime ou identifier des interlocuteurs potentiels pour trouver des informations, de l’aide, ou solliciter un accompagnement.
Pourtant, plusieurs acteurs se trouvent être des relais pour une information, primaire ou plus approfondie en matière de harcèlement et de sexisme.
Ces acteurs peuvent être internes à l’entreprise, ou bien externes à celle-ci.

Les acteurs internes à l’entreprise

♞ Le Comité social et économique (CSE) est l’instance de représentation du personnel dans l’entreprise. Il doit être mis en place dans les entreprises de plus de 11 salariés. Ses membres sont élus par les salariés de l’entreprise pour une durée maximale de 4 ans.
Depuis le 1er janvier 2019, dans toutes les entreprises quelque soit leur effectif, le CSE doit désigner parmi ses membres, un référent harcèlement pour la lutte contre le harcèlement sexuel et les agissement sexistes.

♞ Dans les entreprises de plus de 250 salariés, un référent harcèlement doit être spécialement désigné par l’employeur.
Il est ainsi différent du référent désigné par le CSE. Néanmoins, leurs missions tendant à être similaires, elles ont besoin d’être articulées.

♞ Au-delà de ces personnes désignées, tout acteur de l’entreprise peut être sollicité dès lors qu’il constitue une personne ressource ou de confiance : qu’il s’agisse du service des ressources humaines, d’un membre de ce service, du directeur des ressources humaines, d’un responsable, d’un membre des organes de direction, d’un salarié du même service, d’un manager d’un autre service…
Il est bien évident que tous ne sont pas nécessairement formés en matière de harcèlement et de prévention du sexisme, néanmoins ils peuvent être un premier contact, éventuellement un soutien. A charge pour eux d’accompagner, d’orienter la personne vers un relai spécialement dédié.

♞ S’agissant de la direction, il convient de rappeler quelques chiffres : malgré le mouvement de libération de la parole, 1 individu sur 10 ne parle à personne des agissements subis.
Pire encore, dans 70% des cas, ni l’employeur, ni la direction, n’ont été informés de la situation.

IMPORTANT : Il est impératif de comprendre que seul l’employeur, à partir du moment où il est informé de faits de harcèlement, a le pouvoir et le devoir d’engager une procédure particulière d’enquête, laquelle est seule à même de faire lumière sur les faits allégués.
Cette démarche a pour objectif de révéler les faits subis, et permet une fois celle-ci menée à son terme, de prendre des mesures disciplinaires contre l’auteur des faits.

Il convient néanmoins de se garder de tout angélisme : selon une enquête de 2014 menée pour le Défenseur des Droits, 1 femme sur 5 sera victime de harcèlement sexuel au cours de sa vie professionnelle. Déjà en 1991, une étude rapportait sensiblement les mêmes chiffres et ce, malgré un accroissement des droits des victimes et des dispositifs existants. La difficulté tient notamment aux problème relatifs à la preuve, que la loi semble avoir pour partie résolus, et également à la difficulté de révéler ce type de faits.
En effet, lorsqu’il y a dénonciation, elle apparaît souvent comme faite au détriment de la victime ; 40% des personnes harcelé.e.s estiment que l’affaire s’est achevée à leur détriment.

On retrouve souvent les mêmes mécanismes de banalisation (tout le monde fait ça, c’est partout pareil), de minimisation (c’est pas si grave, y a pas mort d’homme, il ne t’a pas violé), ou encore de culpabilisation de la victime (tu t’attendais à quoi en rentrant dans son bureau ? Oui mais tu y es allé quand même…).
Ce faisant, on cautionne, valide, autorise des comportements qui sont a minima irrespectueux, blessants, humiliants, et dans les pires scénarios, illégaux.

Dans les faits, on a tous été un jour témoin ou la cible d’une remarque, un peu déplacée, pas forcément lancée dans le but de nuire, mais maladroite ou vexante. On a été nombreux à ne pas forcément répliquer, et à ne pas forcément en parler.
Historiquement, un certain nombre d’affaires et de scandales (DSK, Weinstein, octobre 2017) suivis de mouvements de libération de la parole, ont permis une hausse massive dans signalements.
En conséquence, face à l’ampleur du phénomène qui a touché toutes les sphères de la société, en particulier la sphère professionnelle, le législateur français a procédé au renforcement des obligations des employeurs en matière de prévention et de sanction du harcèlement sexuel.
D’où l’importance de ne pas garder des faits, quand bien même il y a un doute. D’où l’importance d’en parler, de libérer la parole, de demander de l’aide.

Les acteurs externe à l’entreprise

Hors les murs de l’entreprise, les conseillers du salarié dont la liste est établie par la Direction Départementale chargée de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DDETS, ancienne DIRECCTE), peuvent relayer des informations, écouter et orienter une demande.
Ce sont les membres de l’inspection du travail qui peuvent avoir ce rôle, accueillir, écouter, recueillir des signalements, oralement ou par le biais de courriers, qu’ils soient postaux ou électroniques.
En outre, la médecine du travail à l’occasion des visites médicales périodiques peuvent être un premier relai d’information en la matière.
Enfin, des associations d’aide aux victimes, le délégué du Défenseur des Droits, qui tient des permanences en général au sein des Préfectures de chaque département, ou encore des avocats peuvent informer, renseigner, orienter des personnes qui s’interrogent sur ces problématiques.

Pour toute question complémentaire et pour aller plus loin, n’hésitez pas à nous solliciter : contact@projet-callisto.fr

L’agissement sexiste, une incrimination récente

Le texte :

La loi du 17 août 2015 a crée dans le Code du travail, un article L. 1142-2-1 relatif à l’interdiction de tout agissement sexiste en milieu professionnel.
Le texte explique que « nul ne doit subir d’agissement sexiste défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».

Des exemples :

Dans son kit pour agir contre le sexisme, le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes cite un certain nombre d’exemples significatifs pour illustrer les multiples formes que peut prendre un agissement sexiste. C’est par exemple :
– critiquer une femme parce qu’elle n’est pas assez féminine selon l’auteur
– critiquer un homme parce qu’il n’est supposément pas assez viril
– avoir une conduite verbale ou une posture corporelle qui montre de l’hostilité envers une personne en raison de son sexe : misogynie avérée, dédain, mépris pour une personne en raison de son sexe, ou pour une catégorie de personnes en raison de leur sexe
– ne pas prendre les compétences des salariés au sérieux, et les humilier parce que ce sont des femmes par exemple : « bonnes à faire la popote », « t’aurais du rester dans ta cuisine »
– commentaires humiliants ou désobligeants en raison du sexe
– proférer des menaces ou tout autre comportement verbal ou physique fondé sur le sexe de la personne
– faire des blagues sexistes, obscènes, graveleuses, de manière répétée
– fragiliser le sentiment de compétence par des remarques ou des pratiques offensantes…

La sanction :

À l’inverse d’autres incriminations (cf infra), le sexisme ordinaire est dépourvu d’équivalent dans le Code pénal. En effet, l’auteur d’un agissement sexiste est seulement susceptible d’être sanctionné de manière disciplinaire par son employeur.
Concrètement, il encourt un avertissement, un blâme, ou toute autre mesure disciplinaire telle une rétrogradation, une mutation et éventuellement, si les conditions le permettent, un licenciement.
Cette sanction touche tout type de collaborateur de l’entreprise, aussi bien les cadres que les employés, puisque l’auteur d’un agissement sexiste peut se trouver être un supérieur hiérarchique direct, un responsable ou encore un collègue de la victime.

Pour attraire devant les juridictions répressives (tribunal correctionnel), il convient de se référer à des infractions pénales approximatives du sexisme, comme les injures à caractère sexiste, le harcèlement, moral ou sexuel, ou la discrimination en raison du sexe.

Distinction avec des notions voisines :

❦ Le harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel, suppose des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits, à la dignité, à la santé ou à l’avenir professionnel de la personne.
Le harcèlement est réprimé à la fois par le Code du travail et par le Code pénal. C’est-à-dire qu’il fait encourir à la fois une sanction disciplinaire et une sanction pénale.
L’agissement sexiste quant à lui, est un comportement unique, ponctuel, réprimé de manière disciplinaire uniquement.
A noter : à partir du moment où l’agissement sexiste vient à se répéter, il peut être constitutif de harcèlement sexuel.

❦ La discrimination s’entend d’une différence de traitement reposant sur un motif lié à la santé, à l’âge, au sexe, à la religion, aux opinions d’une personne (liste non exhaustive). Elle est un délit pénal, et fait encourir 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
L’agissement sexiste peut constituer une mesure de discrimination, mais ce n’est pas systématique.

⇒ D’une manière générale, la notion de sexisme, a fortiori celle de sexisme ordinaire, est codifiée dans la notion d’agissement sexiste alors que dans le harcèlement et la discrimination, elle ne se retrouve pas à proprement parler ; elle peut s’y retrouver, mais ce n’est pas leur essence.

La responsabilité de l’employeur :

L’employeur est susceptible de voir sa responsabilité civile engagée, et être ainsi condamné à réparer le préjudice subi.
En effet, la victime a la possibilité de saisir le conseil des prud’hommes en vue d’obtenir réparation. Cela peut se faire de deux façons :
– au titre de la violation de l’interdiction de tout agissement sexiste sur le lieu de travail, s’il est commis par un salarié de l’entreprise,
– au titre du non-respect, par l’employeur, de son obligation de santé et de sécurité, et ce, quelle que soit la personne ayant commis ces agissements (client, collègue, supérieur).

Le harcèlement d’ambiance, de quoi s’agit-il ?

Innovation jurisprudentielle, le harcèlement d’ambiance a émergé en France ces dernières années.

De quoi s’agit-il ? Que dit la loi ? Quel est l’apport à la notion plus large de harcèlement ? Qu’est-ce que cela implique pour les employeurs, les auteurs de harcèlement, les victimes ?

Le cadre légal en vigueur :

Le harcèlement sexuel, défini par la loi du 6 août 2012, prévoit qu’il est constitué par « le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».

Une évolution du cadre légal :

Dans sa rédaction antérieure à 2012, l’article L. 1153-1 du Code du travail définissait le harcèlement sexuel au regard du but poursuivi de son auteur, qui à l’époque, visait uniquement la volonté d’obtenir des faveurs de nature sexuelle.

Or, le harcèlement n’est pas que cela, et depuis la loi du 6 août 2012, le Code du travail vise des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés, qui ont deux séries de conséquences :
– soit de porter atteinte à la dignité du salarié visé en raison de leur caractère dégradant ou humiliant,
– soit de créer à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

La finalité initialement recherchée, à savoir des faveurs de nature sexuelle, a disparu et la loi désormais se place non plus du point de vue moral de l’auteur, mais selon l’effet produit sur la victime.
C’est dans ces conditions, qu’une jurisprudence a pu, au visa de ce texte, enrichir la notion de harcèlement.

Une jurisprudence novatrice :

Un arrêt de la Cour d’appel d’Orléans rendu le 7 février 20171 a reconnu qu’une salariée, sans être directement visée par les agissements de harcèlement sexuel – photographies pornographiques, propos dégradants sur les femmes – subissait au quotidien un environnement de travail particulièrement hostile rendant ses conditions de travail insupportables.

La cour l’a ainsi considérée victime de harcèlement sexuel d’ambiance, notion novatrice élargissant la notion telle qu’issue de la loi du 6 août 2012.
Plus encore que la reconnaissance, la Cour a sanctionné un environnement de travail sexiste, où une atmosphère de travail hostile provoquant le malaise des plaignant.es peut suffire à le qualifier comme tel.

Dans le cas d’espèce, cet environnement sexiste se manifestait par :
– des propos sexistes
– des insultes graveleuses
– des « plaisanteries » à connotation sexuelle dirigées à l’encontre des collègues féminines
– des conversations et bruitages dégradants tenus en présence de la plaignante
– des provocations, blagues obscènes et vulgaires imposées à la communauté de travail, alors même qu’elles ne visaient pas nommément ni précisément les salariés qui s’en sont dit offensés.

L’employeur a objecté le fait que « ces évènements vulgaires […]n’étaient pas personnellement destinés [à la plaignante] et que la qualification de harcèlement sexuel suppose des propos et comportements à connotation sexuelle directement imposés à la victime »2.

La Cour ne l’a pas entendu de cette oreille, et c’est au visa de l’article L. 1153-1, 1° du Code du travail qu’elle a estimé que « le harcèlement sexuel peut consister en un harcèlement environnemental ou d’ambiance, où, sans être directement visée, la victime subit les provocations et blagues obscènes ou vulgaires qui lui deviennent insupportables ».

Une condamnation au regard des EFFETS du harcèlement :

Le comportement de harcèlement sexuel doit être incriminé à deux titres :
– au regard de son objet : c’est-à-dire l’objectif poursuivi par l’auteur,
– au regard de ses effets : c’est-à-dire l’atteinte à la dignité de la personne victime ou bien la création d’un climat de travail qui soit hostile et offensant. Ces effets se mesurent notamment par la dégradation de l’état de santé du plaignant. C’était le cas en l’espèce.

Ce qui est intéressant ici, d’un point de vue juridique, c’est que la cour ne s’est pas basé sur la personne plaignante en tant que destinatrice des propos, insultes, blagues graveleuses, qui ne la concernaient même pas, mais sur les effets de ces propos, insultes, blagues graveleuses.
Et ces agissements ont eu pour effet la dégradation objective de son état de santé. Ce que la plaignante a pu matériellement prouver.

L’intervention du Défenseur des droits :

Le Défenseur des droits est une autorité administrative indépendante, qui est intervenue à l’audience précitée.
Il avait à cette occasion, rappelé que l’article L. 1153-1 du Code du travail, issu de la loi du 6 août 2012, opérait transposition de la directive européenne posant définition du harcèlement sexuel.
Cette directive n°2006/54/CE du 5 juillet 2006 fait du harcèlement une discrimination à part entière. Plus intéressant encore dans notre cas d’espèce, elle érige comme éléments constitutifs de l’infraction lesdites conséquences du harcèlement, à savoir l’atteinte à la dignité de la victime ou l’environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant3. C’est-à-dire que la finalité du harcèlement n’est plus la recherche de faveurs sexuelles mais l’atteinte à la dignité ou l’environnement hostile.

En quoi c’est novateur :

La loi et la jurisprudence ont fait avancer l’incrimination et la répression du harcèlement ces dernières années, à ce titre facilité la charge de la preuve, et l’obligation mise à la charge de l’employeur de prévenir le harcèlement au sein de son entreprise :

>>> La charge de la preuve :

La loi n°2016-1088 du 8 août 2016 refond la rédaction d’un article L. 1154-1 du Code du travail en matière de charge de la preuve4.
Ce texte prévoit désormais que, dans le cadre d’un litige relatif à des faits de harcèlement, le plaignant doit apporter « des éléments de faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement ». C’est-à-dire qu’il ne doit plus rapporter une preuve matérielle parfaite et irréfutable, mais présenter des éléments, un faisceau d’indices, laissant envisager la possibilité de l’existence de faits de harcèlement.

Et l’alinéa 2 de poursuivre qu’au vu de ces éléments, il appartient alors au défendeur démontrer que ces éléments ne sont pas constitutifs de harcèlement, et que les éventuelles décisions prises l’ont été au vu d’éléments objectifs étrangers à tout fait de harcèlement.
Et c’est finalement le juge qui tranche, après avoir analysé ces différents éléments.

Cette nouvelle disposition est innovante, en ce qu’elle décharge le plaignant d’une obligation particulièrement lourde ; en effet, en matière de harcèlement, la preuve est délicate à rapporter tant le harcèlement est difficile à appréhender. Il est souvent verbal, rarement écrit, et ne se résume pas des insultes, mais plutôt à une succession de remarques, piques, propos acerbes, remarques ironiques, désagréables, disqualifiantes, souvent faites à huis clos ou devant témoins, peu nombreux, et rarement susceptibles de dénoncer les faits.

>>> L’obligation à la charge de l’employeur :

Il convient de rappeler que l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité de résultat, en vertu de l’article L. 4121-1 du Code du travail.
A ce titre, il est tenu d’assurer la sécurité de ses salariés, et doit notamment prendre les mesures nécessaires en vue de prévenir le harcèlement, moral ou sexuel, d’y mettre un terme et le cas échéant, de le sanctionner.
Dans la mesure où il satisferait pas à son obligation, il serait susceptible d’engager sa responsabilité, civile. C’est-à-dire qu’un salarié pourrait tout à fait le poursuivre devant le Conseil de Prud’hommes, pour manquement à son obligation de sécurité, indépendamment de toute action à l’encontre de l’auteur du harcèlement

La difficulté s’agissant du harcèlement sexuel d’ambiance est que celui-ci a la particularité d’être produit par la communauté de travail elle-même. Dans ces conditions, un employeur peut très vite se montrer dépassé.
Dès lors, il est vivement conseillé aux employeurs de mettre en place en amont des sessions de formation à destination de toutes ses équipes, qu’elles soient dirigeantes, responsables, exécutantes.
De même, il est vivement recommandé de pratiquer une tolérance zéro, et à cet égard de prendre toute mesure disciplinaire à l’encontre de chaque salarié auteur de fait de harcèlement, qu’il vise personnellement un autre salarié, ou qu’il soit constitutif de harcèlement d’ambiance. Si ces faits ne peuvent être sanctionnés sur le fondement du harcèlement en ce qu’il suppose une répétition des faits, d’autres incriminations existent : l’agissement sexiste5, la prohibition des discriminations6

Illustration :
À La Réunion, le Conseil des prud’hommes a condamné un employeur à réintégrer une salariée à qui un cadre avait tenu des propos à connotation sexuelle. Il a en outre été condamné à lui payer 4 ans de salaire7
C’est une décision dont les conséquences sont lourdes, pour l’employeur.
En cela, elle constitue un signal envoyés aux employeurs. Ils sont tenus, cela fait partie de leurs obligations, de protéger leurs salariés de telles atteintes. Ne le faisant pas, ils s’exposent à être condamnés.

D’autres exemples de harcèlement sexuel d’ambiance :

Sans prétendre à l’exhaustivité, voici quelques exemples de harcèlement sexuel d’ambiance, certains vus dans les tribunaux, d’autres entendus ou rapportés :
– Le calendrier de charme ou pornographique affiché dans un espace « public », comme les machines à café, le bureau d’un open space, une banque d’accueil…
– Les posters pornographiques, les fonds d’écran ou écrans de veille explicites, les montages photos pornographiques…
– Les blagues sexistes, graveleuses, obscènes, dans l’open space, à la machine à café, au réfectoire dès lors qu’elles peuvent être entendues par des tiers qui ne les ont pas sollicitées,
– Les propos dénigrants et disqualifiants récurrents à l’endroit d’une communauté en particulier,
– Les récits de péripéties sexuelles,
– Le fait d’imposer à son équipe de mimer des actes sexuels pour avoir le droit d’aller en pause…

Pourquoi le pénaliser ?

Le harcèlement a des effets particulièrement délétères sur les personnes qui le subissent, leur entourage immédiat et l’environnement au sens large.
Pour les victimes directes, on parle de dégradation des conditions de vie, de la santé mentaleanxiété, troubles du sommeil, dépression… – mais également de l’image de soi
Les manifestations qui doivent alerter sont : la baisse de motivation ; les retards répétés ; l’augmentation des absences, justifiées ou non, des arrêts de travail.

Au niveau de l’entreprise, un fort taux d’absentéisme, de retards, d’arrêts de travail voire un turn-over important sont autant de signes faibles qui doivent alerter.

Enfin, le harcèlement d’ambiance en ce qu’il banalise voire légitime un environnement hostile notamment à l’égard des femmes et des minorités, constitue en lui-même une violence sexiste et sexuelle, et rend possible la survenance d’autres violences sexistes et sexuelles, telles que les agressions sexuelles ou les viols. C’est ce qu’on appelle le continuum des violences. Ce sont des délits.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à nous contacter : contact@projet-callisto.fr

1CA Orléans, 7 févr. 2017, no 15/02566
Lire la décision : https://juridique.defenseurdesdroits.fr/index.php?lvl=notice_display&id=19256

2https://www.lextenso-etudiant.fr/article-%C3%A0-la-une-p%C3%A9nal-social/le-harc%C3%A8lement-sexuel-d%E2%80%99ambiance
3 op.cit.
4A noter que cette disposition n’était pas applicable au cas jugé par la Cour d’appel d’Orléans en 2017, car le litige était antérieur à l’entrée en vigueur de ladite loi.
5Article L. 1142-2-1 du Code du travail
6Article L. 1132-1 du Code du travail
7https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/c-est-mon-boulot/attention-au-harcelement-sexuel-d-ambiance_2678844.html

Le sexisme, c’est quoi ?

Comment définir le sexisme ?

Le sexisme se caractérise par le fait d’être discriminé en fonction de son sexe.

La notion de sexisme induit un rapport plus ou moins hiérarchique entre les deux sexes, et recouvre expressions et comportements qui méprisent, dévalorisent et discriminent un sexe.
Les deux sexes sont concernés, et peuvent ainsi être visés par des propos ou attitudes sexistes.
En pratique, ce sont le plus souvent des femmes qui sont victimes de sexisme.

C’est-à-dire qu’en France, en 2021, le simple fait d’être une femme constitue une cause de discrimination.
Et le sexisme au travail est une réalité pour plus de 8 femmes sur 10, d’après le baromètre du collectif #StOpE1. Ce sentiment est d’ailleurs partagé par 60 % de leurs collègues masculins.

Le sexisme est le principal obstacle à l’égalité homme-femme.

Que dit la loi ?

La loi réprime désormais le sexisme au travers de plusieurs incriminations, parmi lesquelles : l’outrage sexiste.

Depuis une loi récente du 3 août 2018, selon l’article 621-1 du Code pénal, constitue un outrage sexiste le fait d’ « imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ».

L’outrage sexiste est une contravention de 4ème classe, sanctionnée d’une amende pouvant aller jusqu’à 750€.
Dans les formes aggravées, il fait encourir une contravention de 5ème classe, soit 1.500 € maximum et 3.000 € en cas de récidive.
Des peines complémentaires peuvent être décidées par le juge, de type travaux d’intérêt général ou stage.

Dans le cadre du travail spécifiquement, l’agissement sexiste est prévu et réprimé par l’article L. 1142-2-1 du Code du travail. Ce texte précise que « nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ».

Trois éléments doivent être réunis :

  • l’existence d’un ou de plusieurs éléments de fait, protéiformes (comportement, propos, acte, écrit), subi(s) par une personne, c’est-à-dire non désiré(s),
  • la finalité de l’agissement : il doit avoir pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité du/de la salarié.e ou bien de créer un environnement de travail intimidant, hostile, humiliant ou offensant,
  • l’existence d’un lien entre les agissements subis et le sexe de la personne : un.e salarié.e subit ces agissement(s) de manière répétée parce qu’elle est une femme, ou parce qu’il est un homme.

Plusieurs sanctions de l’agissement sexiste sont possibles, qui visent tout à la fois l’auteur des faits mais aussi l’employeur :
L’auteur encourt une sanction disciplinaire, en vertu de l’ article L. 1331-1 du Code du travail.
Il convient de préciser que, dès lors que l’agissement sexiste se répète, c’est-à-dire à partir du moment où il survient 2 fois, il s’agit alors de harcèlement sexuel. Dans ces conditions, l’employeur peut voir sa responsabilité engagée, s’il est avéré qu’il n’a pas mis en œuvre tous les moyens pour prévenir et faire cesser le harcèlement.

Exemples :

Le sexisme en entreprise, c’est un large faisceau d’attitudes et de comportements, immédiatement visibles pour certains, difficilement perceptibles pour d’autres. Ce sont notamment :

  • Des blagues sexistes : qu’elles soient graveleuses, lourdingues, dénigrantes envers les femmes, « 8 collaboratrices sur 10 affirment en avoir déjà entendu, de même que 3/4 des hommes », toujours selon le baromètre du collectif #StOpE.
  • Des propos dénigrants, méprisants, sur les femmes, leurs capacités, leurs activités : « trucs de bonnes femmes », « femme au volant, mort au tournant », « retourne à ta cuisine »
  • Des insultes : c’est ce qu’a sanctionné la Cour d’appel de Colmar dans un arrêt du 27 octobre 20202 où un chef d’équipe insultait régulièrement deux employées, en raison de leur sexe.
  • Plus surprenant pour certain.e.s, ce sont également les quolibets en apparence « mignons » mais qui relève du sexisme ordinaire dit bienveillant, de type « ma mignonne », « ma jolie », « ma petite »…
  • Il s’agit aussi de traitements différents visant les femmes, en comparaison de leurs homologues masculins.
  • C’est encore la remise en cause des capacités, performances d’une femme à manager, diriger une équipe, piloter un projet. A ce titre, d’après le baromètre susmentionné, « 44% des collaboratrices ont déjà entendu des propos disqualifiants à l’égard de l’aptitude managériale d’une femme et 43% pour ce qui est de diriger un service ou une entreprise ».
  • Ce sont encore des propos, préjugés, stéréotypes liés à la maternité ou au temps partiel.
  • Moins visibles, ce sont encore les freins faits aux femmes à leur évolution professionnelle, en raison de leur sexe. Plus de la moitié des femmes interrogées le déplorent.

Attention ! Le sexisme ne vise pas uniquement les femmes : environ 4 hommes sur 10 ont déjà été la cible de propos sexistes.
La mécanique sexiste est identique : les hommes visés sont comparés aux clichés masculins, aux attentes de la masculinité telle qu’elle est véhiculée dans la société, et sont dénigrés s’ils n’y correspondant pas.
Tel est le cas d’une équipe offrant à un collègue, à l’occasion des fêtes de fin d’année, un abonnement à la salle de sport pour que celui-ci « s’endurcisse et ne ressemble plus à une femmelette mais à un vrai homme ».
Ce sont encore les propos stigmatisant relatifs à la paternité : les hommes prenant un congé parental ainsi que la loi le leur permet depuis le 1er juillet 2021, sont parfois mal vus et malmenés au sein de leur entreprise3.

Dans tous les cas, peu importe le sexe de la personne qui en est destinatrice, ces remarques, propos, attitudes, comportements, sont inacceptables !

Comment lutter contre ces pratiques ?

La formation des dirigeants, responsables ainsi que des équipes est plus qu’indispensable, pour sensibiliser le plus grand nombre sur ces questions, favoriser la prise de conscience, libérer la parole et sanctionner ces comportements.

Dans la même logique, prévoir des incriminations est un premier pas, appliquer de manière effective les sanctions prévues en est une autre. Que ce soit les entreprises ou bien les juridictions, cela envoie d’ailleurs un message fort, clair qui rappelle le cadre, à savoir une société qui ne tolère pas le sexisme, sous quelque forme que ce soit.

1 https://www.helloworkplace.fr/sexisme-travail-femmes-2/

2Cour d’appel de Colmar, 27 octobre 2020, n° 18/03210

3https://www.capital.fr/votre-carriere/il-est-insulte-par-son-patron-pour-avoir-demande-le-conge-parental-1413241

Peut-on être sanctionné pour avoir dénoncé des faits de harcèlement ?

Aline est à la machine à café ce matin, lorsque dans le couloir passent Eric, le collègue d’un autre service, accompagné de son supérieur, Nicolas. Tandis qu’ils s’éloignent, Aline entend la fin de la remarque de Nicolas envers son subordonné : « mon pauvre Eric, qu’est-ce qu’on va faire de toi ?! ». Le ton est cinglant, la remarque acerbe.
Aline tique. Ce n’est pas la première fois qu’elle surprend ce genre de mots à l’adresse d’Eric, et elle n’est pas la seule dans l’entreprise à être témoin des agissements et propos dénigrants de Nicolas.

Elle s’interroge. Que peut-elle faire ? Qui peut-elle contacter ? Où et comment se renseigner ?
Plus encore : que se passe-t-il pour elle en cas de dénonciation, que les faits soient avérés ou au contraire qu’ils ne soient finalement pas établis ?

❋ Différents interlocuteurs peuvent être sollicités, que ce soit au sein de l’entreprise ou bien à l’extérieur, qui renseignent sur les questions de harcèlement en milieu professionnel.
En interne, c’est d’abord le CSE s’il existe ; un élu du personnel doit d’ailleurs être désigné référent en matière de harcèlement. Il peut être un premier relai d’information.
Au-delà de cette personne ressource, tout acteur de l’entreprise peut être sollicité dès lors qu’il constitue un personne de confiance : service des ressources humaines, responsable, organes de direction, un salarié du même service, le manager d’un autre service.
Hors les murs de l’entreprise, les conseillers du salarié dont la liste est établie par la Direction Départementale chargée de l’Emploi, du Travail et des Solidarités (DDETS ou ancienne DIRECCTE), peuvent relayer des informations, écouter et orienter une demande. Il peut s’agir aussi d’un membre de l’inspection du travail, de la médecine du travail, ou encore d’un avocat…

❋ De manière très pragmatique, que l’on soit victime ou témoin de harcèlement, le plus judicieux consiste, le plus tôt possible, à compiler, collecter tous les faits en question.
Il s’agit d’horodater les faits (le jour et l’heure), de les localiser (où ont-ils eu lieu : couloirs, machine à café, salons d’exposition, déplacements, bureaux…), de préciser les personnes présentes (témoins, victimes, et leurs qualités respectives), leurs comportements, les réactions éventuelles…
L’idée est d’avoir un document complet, le plus précis possible qui retrace la chronologie des événements.
A ce stade, il n’est pas nécessairement question d’action en justice ; dans l’exemple, Aline compile ce à quoi elle a assisté depuis plusieurs semaines, et décide finalement d’en parler avec Eric, qui jusque là, semble être dans le déni et trouve des excuses à son supérieur.
Ultérieurement, cette chronologie pourra effectivement servir lors de la procédure d’enquête en interne, voire plus marginalement à une action en justice si l’affaire venait à être portée à la connaissance des tribunaux.

Attention : depuis la loi Travail du 8 août 2016 le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement et non plus établir des faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement.

❋ S’agissant plus particulièrement de la protection contre les mesures de rétorsion, l’article 3 de la loi du 27 mai 2008 précise qu’« aucune personne ayant témoigné de bonne foi d’un agissement discriminatoire ou l’ayant relaté ne peut être traitée défavorablement de ce fait ».

L’article L. 1153-2 du Code du travail tel qu’issu de la loi n°2012-954 du 6 août 2012 prévoit, qu’« aucun salarié (…) ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l’article L.1153-1 […] ».

De même, l’article L. 1153-3 dispose : « aucun salarié (…) ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés».

Ainsi, celle ou celui qui subit ou dénonce des faits de harcèlement sexuel en toute bonne foi, est protégé contre toute mesure de rétorsion.
A l’inverse, une personne qui aurait de mauvaise foi rapporté de tels faits, ne saurait se prévaloir de la protection desdites dispositions, et redeviendrait accessible à une sanction.

❋ S’agissant des mesures de protection des fonctionnaires ou agents publics victimes ou témoins de harcèlement sexuel :

Comme les salariés du secteur privé, les fonctionnaires et agents publics sont protégés contre les mesures de rétorsion. Ainsi toute décision défavorable en lien avec le fait d’avoir dénoncé des faits de harcèlement sexuel ou moral est prohibée selon l’article 6 ter de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Cet article précise : « aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l’évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire :
1° Parce qu’il a subi ou refusé de subir les faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas, y compris, dans le cas mentionné au a, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés ;
2° Parce qu’il a formulé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces faits ;
3° Ou bien parce qu’il a témoigné de tels faits ou qu’il les a relatés ».

Par ailleurs, il faut préciser que les personnes qui saisissent le Défenseur des droits ne peuvent faire l’objet, pour ce motif, de mesures de rétorsion ou de représailles et ce, en vertu de l’article 20 de la loi organique n°2011-333 du 29 mars 2011.

Dans tous les cas, ne restez pas seul(e) avec vos doutes et questions ; parlez-en, à des proches, à des professionnels. Callisto est un lieu d’accueil, d’écoute, d’information, d’échange et d’orientation. Vous pouvez nous solliciter directement à l’adresse : contact@projet-callisto.fr

Qu’est-ce que le harcèlement ?

Le harcèlement est une répétition de propos et de comportements ayant pour but ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la personne qui en est victime, ainsi qu’une atteinte à sa dignité, qui se traduit par des conséquences sur sa santé physique ou mentale.

A noter que le harcèlement peut être moral ou sexuel.

Le harcèlement peut se rencontrer tant sur le lieu de travail que dans toute autre sphère de la vie privée.

C’est pourquoi la loi distingue entre le harcèlement au travail, qu’il soit commis sur le lieu de travail, ou à l’occasion de l’exercice de l’activité professionnelle, et le harcèlement commis dans tout autre lieu. Ainsi on retrouve des dispositions incriminant le harcèlement à la fois dans le Code du travail et dans le Code pénal.

La loi distingue encore entre harcèlement moral et harcèlement sexuel, lequel a la particularité d’appartenir aux violences sexistes et sexuelles au côté des agissements, outrages sexistes, agressions sexuelles et viol notamment :

Le harcèlement moral est réprimé par le Code pénal, aux articles 222-33-2 à 222-33-2-2, et par le Code du travail, aux articles L.1152-1 à L1152-6.
Il s’entend de violences répétées, verbales, physiques ou psychologiques, utilisées pour intimider, déstabiliser, mettre à l’écart ou discréditer une personne.
Point de vigilance : au travail, aucune exigence de lien hiérarchique entre l’auteur et la victime n’est nécessaire pour caractériser des faits de harcèlement. Le harcèlement est en effet possible entre deux collègues, entre un cadre et un subordonné qui ne serait pas directement sous ses ordres, entre un salarié et une personne extérieure à l’entreprise, tel un fournisseur ou un client. A ce titre, les professions en contact direct et fréquent avec le public ou la clientèle présentent un facteur de surexposition au risque, en ce que cela démultiplie les interlocuteurs et donc les occasions d’être insulté.e.s, rabroué.e.s, humilié.e.s, harcelé.e.s. Le risque augmente encore lorsque ces professionnels se trouvent être des femmes.

Le harcèlement sexuel quant à lui, est réprimé :
– par le Code du travail, aux articles L. 1153-1 à L. 1153-6,
– par la loi Le Pors du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, en son article 6ter,
– par le Code pénal, à l’article 222-33. Ainsi incriminé, le harcèlement relève de la section relative aux viol, inceste et autres agressions sexuelles.

Le harcèlement étant un délit, la sanction encourue est de 2 ans de prison et 30.000 euros d’amende. Dans ses formes aggravées, elle peut aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 €.

En pratique, peu de situation de harcèlement sont dénoncées, et moins encore sont portées à la connaissances des autorités judiciaires. Moins de 5% des situations de harcèlement dénoncées font l’objet d’un procès. Et s’agissant des condamnations, elles restent extrêmement marginales.
La difficulté majeure qui entoure la sanction judiciaire du harcèlement réside en la preuve.
De par son fonctionnement, le harcèlement est rarement explicite, et peu souvent commis devant des nombreux témoins. Cela peut arriver, toutefois l’écrasante majorité des cas rapportés témoigne de harcèlement à huis clos, fait de manière insidieuse, avec peu de témoins. Lorsqu’il y en a, ils ne sont pas ou peu en mesure de révéler les faits, soit qu’ils soient intimidés, subordonnés, d’anciennes victimes, soit qu’ils craignent de devenir victime à leur tour…

Néanmoins, il est vivement conseillé aux personnes victimes voire aux témoins, de collecter le plus tôt possible, tous les éléments matériels susceptibles de constituer un commencement de preuve : en premier lieu les mails, les SMS et autres messages écrits ou oraux – comme ceux laissés sur un répondeur. En général, ils sont rarement explicites mais ajoutés à d’autres éléments, ils peuvent constituer un faisceau d’indices, de nature à matérialiser une situation de harcèlement.
Ce peut être aussi des témoignages, tant de personnes encore en poste dans l’entreprise, que des personnes ne faisant plus partie des effectifs, soit qu’elles aient été victimes de harcèlement, soit qu’elles en aient été témoins. Là encore, le témoignage est difficile à obtenir, tant les personnes peuvent craindre de s’exposer.
Il peut également s’agir de certificats médicaux attestant de troubles divers – dépression, troubles du sommeil, angoisses – avec la possibilité de les dater. D’où l’importance de consulter rapidement, des professionnels du secteur médical, y inclus la médecine du travail.

Il est important que le salarié victime ne reste pas isolé, et qu’il soit au contraire accompagné, quelque soit la suite de événements. De nombreux interlocuteurs, internes ou externes à la société, peuvent être un soutien, un appui important pour un salarié victime de harcèlement. Parmi eux :
– les référents au sein du CSE : depuis le 1er janvier 2019, dans toutes les entreprises quelque soit leur effectif, le CSE lorsqu’il y en a un, doit désigner parmi ses membres un référent harcèlement et agissements sexistes,
– les référents harcèlement dans les entreprises de plus de 250 salariés : depuis le 1er janvier 2019, un référent en matière de harcèlement et d’agissements sexistes doit être désigné afin d’informer, accompagner et éventuellement orienter les salariés sur ces thématiques,
l’inspection du travail est également un interlocuteur, pour lui signaler des faits susceptibles de constituer le délit de harcèlement ou d’agissements sexistes, en lui adressant une lettre de signalement,
– enfin, en cas de discrimination, le Défenseur des Droits peut être saisi.

Pour toute information complémentaire, n’hésitez pas à nous solliciter : contact@projet-callisto.fr

Employeurs, comment réagir face au harcèlement ?

La loi, plus particulièrement le Code du travail, met à la charge des entreprises une obligation de sécurité à l’égard de leurs travailleurs, laquelle comprend notamment la prévention et la cessation des faits de harcèlement.

Il a été précédemment abordé les enjeux de l’obligation de prévention (cliquez ici), il s’agit à présent d’étudier la posture à adopter en tant qu’employeur face à des faits de harcèlement.

Le système d’alerte

Le système mis en place par la loi n’est pas que pure prévention, il vise aussi à la cessation des faits de harcèlement, et leur sanction le cas échéant.

Dans l’hypothèse d’une suspicion de faits de harcèlement au sein de l’entreprise, l’employeur a le devoir de mettre en place une procédure de gestion de ces faits.

En pratique, un employeur est informé d’actes de harcèlement moral ou sexuel au sein de sa structure. Cette information peut provenir de plusieurs sources :

– la victime elle-même qui se plaint directement,
– un ou plusieurs témoins qui dénoncent des faits, soit qu’ils les aient vus, soit qu’ils les aient entendus,
– un tiers auquel on aurait rapportés ces faits, et qui les rapporte à son tour,
– enfin, la dénonciation peut provenir de représentants du personnel.

Dans tous les cas, l’employeur doit réagir très rapidement.

Concrètement, il est tenu de mettre en œuvre une procédure spécifique de gestion de ces faits ainsi révélés.

Le moyen d’action : l’enquête

Dès révélation des faits, l’employeur doit, sans tarder, diligenter une enquête afin de déterminer si la situation relève bien d’un cas de harcèlement, le cas échéant apprécier les responsabilités en cause et décider de la mesure de sanction la plus adaptée.

Cette enquête peut être menée avec les représentants du personnel s’ils existent au sein de l’entreprise, et doit répondre à un certain nombre de principes fondamentaux, parmi lesquelles la confidentialité des éléments versés au dossier d’enquête, notamment les témoignages des personnes interrogées. A noter que celles-ci ne sauraient être sanctionnées pour des révélations liées à des faits de harcèlement au sein de l’entreprise.

Toutefois, l’enquête ne saurait être anonyme, de sorte que les témoignages ne peuvent consister en des lettres non signées. Il est nécessaire pour l’employeur d’établir au mieux la matérialité des faits, et pour ce fait de circonscrire le plus précisément possible les faits dénoncés. Ce point est sans doute le plus sensible en matière de dénonciation de faits de harcèlement, aussi il revient à l’employeur de rassurer au maximum ses équipes, et notamment de les informer en amont. C’est tout l’enjeu d’un affichage au sein de l’entreprise, notamment dans le règlement intérieur et le DUER, au sujet de la procédure spécifique d’alerte, son déroulement et les modalités d’enquête. Cette information peut être relayée par une communication au sein de l’entreprise ; elle permet a minima une information en amont, claire et précise permettant de mieux appréhender la situation une fois les faits révélés, et ainsi obtenir une collaboration en toute conscience des salariés désireux de contribuer à l’enquête.

Les sanctions encourues par l’auteur de harcèlement

Lorsque les faits dénoncés sont avérés, soit parce que l’auteur les a reconnus, soit parce que des éléments concordants permettent d’accréditer cette thèse, l’auteur encourt des sanctions, de deux ordres : disciplinaire et pénal.

Au titre de son pouvoir disciplinaire, l’employeur peut engager à l’encontre du salarié fautif, une procédure disciplinaire. Les mesures à sa disposition sont variées : communément, on retrouve le blâme, l’avertissement, la mise à pied à titre conservatoire, ou encore la rétrogradation et la mutation. Cela peut aller jusqu’au licenciement, pour faute.

A noter que, ces faits étant constitutifs de délit, la victime a toujours le droit, sous réserve qu’ils ne soient pas prescrits, de déposer une plainte auprès d’un commissariat ou d’une gendarmerie.

Dans ces conditions, la procédure disciplinaire si elle existe, reste maintenue. Cela n’empêchera pas l’affaire d’être portée devant un tribunal correctionnel, où l’auteur encourt selon les cas, une peine de 2 ans d’emprisonnement et 30.000 € d’amende, et davantage s’il est retenu des circonstances aggravantes.

L’engagement de la responsabilité de l’employeur

Il est impératif d’avoir en tête qu’un employeur ne réagirait pas face à une situation de harcèlement, est susceptible de voir sa responsabilité engagée, alors même qu’il n’est pas lui-même auteur de harcèlement. Ceci est possible en raison de son manquement à garantir la santé et la sécurité de ses salariés.

Ainsi, la victime pourra obtenir réparation, non seulement du harcèlement qu’elle a subi, mais également du manquement de l’employeur à son obligation de prévention.

Employeurs.euses, êtes-vous en règle sur la prévention du harcèlement ?

Que ce soit le harcèlement moral ou le harcèlement sexuel, ils constituent des délits, et sont réprimés par le Code du travail selon qu’ils aient eu lieu à raison de l’activité professionnelle, ou encore par le Code pénal dans les autres cas.

De manière générale, au sein de l’entreprise, l’employeur a l’obligation d’assurer la sécurité de ses salariés. C’est l’article L.4121-1 du Code du travail qui le prévoit. Il est rédigé ainsi :

« L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes ».

Code du travail, art. L.4121-1

Cette obligation s’applique notamment s’agissant du harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel.

Finalement, à la lecture de cet article, on comprend que la loi met en place un système de prévention et d’alerte. Voyons aujourd’hui le système de prévention et ce qu’il implique.

Le système de prévention

La loi prévoit un système de prévention et d’alerte, pour lutter en amont contre le harcèlement, et en aval pour le sanctionner, dans l’hypothèse où des faits de harcèlement seraient révélés.

S’agissant des mesures de prévention plus spécifiquement, elles relèvent de deux ordres : l’information et le repérage.

  • C’est d’abord l’information des salariés sur la législation en vigueur sur le harcèlement, elle se fait essentiellement par voie d’affichage. Le règlement intérieur est l’outil phare en matière d’affichage et d’information. Il doit prévoir une clause spécifique sur le harcèlement, et en cela, mentionner expressément les interdictions relatives au harcèlement, moral et sexuel,
  • Par ailleurs, en vertu des articles R. 4121-1 à R. 4121-4 du Code du travail, l’employeur a l’obligation d’élaborer un document unique d’évaluation des risques. Ce document a pour finalité de dresser un inventaire des risques identifiés pour la santé et la sécurité du personnel de l’entreprise, en ce compris le harcèlement moral et sexuel. Il prend en compte les risques par ordre d’importance, et édicte pour chaque risque identifié, des propositions d’action, notamment de prévention. Ce document est tenu à la disposition des salariés, ou encore de la médecine du travail et de l’inspection du travail. Il doit être mis à jour au moins une fois par an. En l’absence de formalisation des résultats de l’évaluation des risques dans le document unique, l’employeur s’expose à une contravention, de type amende.

  • C’est encore la sensibilisation et la formation des dirigeants, responsables, managers et des équipes, sur le thème du harcèlement. Le but poursuivi est double : il s’agit en premier lieu d’améliorer la connaissance du phénomène, de ses signaux forts et faibles, d’en faciliter le repérage. En second lieu, le fait de former tous les membres d’une même structure permet de créer une culture commune, englobante, égalitaire, pour faire bloc de manière collective contre le harcèlement et plus largement le sexisme et les violences sexistes et sexuelles.

Dans le cas où l’employeur ne mettrait pas en œuvre un système de prévention du harcèlement au sein de son entreprise, il serait susceptible d’engager sa responsabilité. On pourrait ainsi lui reprocher, de ne pas voir mis en œuvre tous les moyens nécessaires pour éviter la survenance d’un tel phénomène.

Outre la prévention, la loi met à la charge de l’employeur un système d’alerte afin de faire cesser les agissements sexistes et de harcèlement au sein de sa structure.

La suite de notre article sur la cessation et la sanction du harcèlement, à retrouver la semaine prochaine !

Les enjeux du harcèlement au travail en 2021

Depuis quelques années, les faits divers se multiplient autour de drames entourant le harcèlement : dénonciation choc, mal-être, démission, suicides… Autant d’événements qui pourraient passer pour exceptionnels, s’ils n’étaient pas si… récurrents !

Et pour cause, en octobre 2017, l’entreprise de recrutement QAPA réalise un sondage sur 4,5 millions de salariés. Il en ressort que 52% des femmes et 27% des hommes auraient déclaré avoir subi un fait de harcèlement sexuel au travail. Pour 45% de femmes et 36% d’hommes, c’était le fait d’un(e) supérieur(e) hiérarchique.
Déjà en l’an 2000, d’après un sondage IPSOS, 30% des salariés français déclarent subir un harcèlement moral au travail.

Le phénomène n’est pas nouveau, il est devenu davantage visible.

Malgré cela, il reste encore peu connu, tabou. Il suffit de poser la question à des collaborateurs pour que des réponses telles que « pas de ça chez nous » fusent. En êtes-vous si sûrs ?

Selon la loi, le harcèlement est une répétition de propos et de comportements ayant pour but ou effet une dégradation des conditions de vie de la victime, et une atteinte à sa dignité. Cela se traduit par des conséquences sur la santé physique ou mentale de la personne harcelée.

Le harcèlement, ce n’est pas une insulte jetée à la figure d’un collaborateur en pleine réunion. Non ! Le harcèlement est beaucoup plus subtil que ça. C’est une remarque faite sur un ton ironique, une pique, un commentaire déplacé. Leur finalité est de blesser, dévaloriser, dénigrer, saper le moral de la personne à laquelle ils s’adressent. Quand ils se répètent, ils deviennent constitutifs de harcèlement, moral. S’ils sont à connotation sexuelle, on parle de harcèlement sexuel.

S’il n’est pas pris en charge rapidement, le harcèlement peut faire son lit et petit à petit, détruire l’estime de la personne qui en est victime : dévalorisation de soi, remise en cause de ses compétences, sentiment d’illégitimité, refus de demander une augmentation ou une promotion, repli sur soi…

Sur le plan professionnel, ce mal-être au travail implique corrélativement une baisse de productivité, car le salarié n’est plus pleinement focalisé sur sa tâche à accomplir.
Il peut s’accompagner de retards, d’arrêts-maladie, d’absentéisme. Il va souvent de pair avec un turn-over important.

En tant que dirigeants, responsables de service, ces indicateurs doivent vous alerter. A minima, afin de réfléchir à la qualité de vie au travail au sein de votre entreprise.

N’oubliez pas que toute situation de harcèlement dénoncée doit faire l’objet d’une réaction de votre part, à défaut de quoi votre responsabilité pourrait être engagée.

Pour plus d’informations, nous contacter : contact@projet-callisto.fr